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Legis


Principes relatifs aux moyens d'enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants pour établir la réalité des faits

Adoptés par l'Assemblée générale des Nations Unies le 4 décembre 2000 (résolution 55/89 Annexe)

1. Toute enquête efficace sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (ci-après dénommés "torture ou autres mauvais traitements") visant à établir la réalité des faits a notamment pour objet:

a) D'élucider les faits, d'établir et de reconnaître la responsabilité des particuliers et de l'État envers les victimes et leur famille;

b) De déterminer les mesures nécessaires pour éviter que ces faits ne se reproduisent;

c) De faciliter les poursuites ou, le cas échéant, les sanctions disciplinaires contre ceux dont l'enquête a établi la responsabilité, et de mettre en évidence la nécessité pour l'État d'accorder pleine réparation, notamment de verser une indemnité juste et adéquate et de fournir des soins médicaux et des moyens de réadaptation.

2. Les États doivent veiller à ce que toute plainte ou information alléguant des actes de torture ou des mauvais traitements fasse promptement l'objet d'une enquête approfondie. Même en l'absence d'une plainte formelle, une enquête doit être ouverte s'il existe d'autres indications donnant à penser qu'on se trouve en présence de cas de torture ou de mauvais traitements. Les enquêteurs doivent être compétents et impartiaux et indépendants vis-à-vis des suspects et de l'organe qui les emploie. Ils doivent être habilités à prendre connaissance des résultats des enquêtes menées par des experts médicaux impartiaux ou par d'autres experts ou à ordonner de telles enquêtes. Les enquêtes doivent être menées selon des méthodes qui répondent aux normes professionnelles les plus exigeantes et leurs conclusions doivent être rendues publiques.

3. a) L'autorité chargée de l'enquête doit être en mesure et a l'obligation d'obtenir tous les renseignements nécessaires à l'enquête . Les enquêteurs doivent disposer de toutes les ressources budgétaires et techniques dont ils ont besoin pour travailler efficacement. Ils ont aussi le pouvoir d'obliger à comparaître et à témoigner toute personne agissant à titre officiel dont on suppose qu'elle est impliquée dans des actes de torture ou des mauvais traitements. Il en va de même en ce qui concerne les témoins. À cette fin, l'autorité chargée de l'enquête est habilitée à citer les témoins à comparaître, y compris les fonctionnaires en cause, et à exiger que des preuves soient fournies.

b) Les victimes présumées de torture ou de mauvais traitements, les témoins, les personnes chargées de l'enquête et leur famille doivent jouir d'une protection contre la violence, les menaces de violence ou toute autre forme d'intimidation qui peut être liée à l'enquête. Les personnes éventuellement impliquées dans des actes de torture ou des mauvais traitements doivent être écartées de toute fonction leur permettant d'exercer une autorité, directe ou indirecte, sur les plaignants, les témoins et leur famille ainsi que sur les personnes chargées de l'enquête.

4. Les victimes présumées de torture ou de mauvais traitements et leurs représentants légaux sont informés de toute audition qui pourrait être organisée, ont la possibilité d'y assister et ont accès à toute information touchant l'enquête; ils peuvent produire d'autres éléments de preuve.

5. a) Lorsque les procédures d'enquête établies sont inadéquates, soit que les compétences techniques ou l'impartialité nécessaires fassent défaut, soit que l'on se trouve en présence d'abus apparemment systématiques ou pour toute autre raison grave, les États veillent à ce que l'enquête soit confiée à une commission d'enquête indépendante ou menée selon une procédure similaire. Les membres de la commission sont choisis pour leur impartialité, leur compétence et leur indépendance personnelles reconnues. Ils doivent, en particulier, être indépendants vis-à-vis des suspects et des institutions ou organes qui les emploient. La commission a tout pouvoir pour obtenir tout renseignement nécessaire à l'enquête, et mène celle-ci conformément aux présents principes 10 /.

b) Un rapport écrit est établi dans un délai raisonnable; il doit notamment indiquer la portée de l'enquête, décrire les procédures et méthodes utilisées pour apprécier les éléments de preuve et contenir des conclusions et recommandations fondées sur les faits établis et le droit applicable. Sitôt achevé, le rapport est rendu public. Il expose en détail les événements constatés et les éléments de preuve sur lesquels s'appuient ces constatations et précise le nom des témoins ayant déposé, à l'exception de ceux dont l'identité n'a pas été révélée aux fins de leur protection. L'État répond dans un délai raisonnable au rapport d'enquête et, le cas échéant, indique les mesures à prendre pour y donner suite.

6. a) Les experts médicaux intervenant dans des enquêtes sur la torture ou les mauvais traitements doivent satisfaire en tout temps aux normes éthiques les plus exigeantes et, en particulier, doivent, avant de procéder à tout examen, obtenir que les intéressés consentent en connaissance de cause. Cet examen doit être conforme aux règles établies de la pratique médicale. En particulier, il doit se faire en privé sous le contrôle de l'expert médical et en dehors de la présence d'agents de la sécurité et autres fonctionnaires.

b) L'expert médical élabore sans retard un rapport écrit détaillé, qui comporte à tout le moins les éléments suivants:

i) Circonstances de l'entretien: nom de la personne examinée et nom et affiliation des personnes présentes lors de l'examen; heure et date précises; emplacement, nature et adresse (y compris, le cas échéant, le local) de l'établissement où l'examen a lieu (par exemple, centre de détention, hôpital ou maison privée); conditions dans lesquelles l'intéressé s'est trouvé lors de l'examen (par exemple, obstacles rencontrés à son arrivée ou pendant l'examen, présence de forces de sécurité pendant l'examen, comportement des personnes accompagnant le détenu ou déclarations menaçantes faites à l'encontre du médecin examinateur); et tout autre facteur pertinent;

ii) Faits: compte rendu détaillé des faits rapportés par l'intéressé pendant l'examen, notamment les actes de torture ou les mauvais traitements allégués, le moment où ils se seraient produits et toute autre plainte faisant état de symptômes physiques ou psychologiques;

iii) Examen physique et psychologique: compte rendu de toutes les conclusions d'ordre physique et psychologique tirées de l'examen clinique, y compris des tests de diagnostic appropriés, et, si possible, des photos en couleurs de toutes les lésions;

iv) Opinion: considérations concernant le lien probable existant entre les conclusions d'ordre physique et psychologique et la possibilité de torture ou de mauvais traitements. Une recommandation doit être faite sur tout traitement médical ou psychologique ou un examen ultérieur qui seraient nécessaires;

v) Identification: le rapport doit indiquer clairement qui a procédé à l'examen et être signé.

c) Le rapport est confidentiel et communiqué à l'intéressé ou au représentant qu'il a désigné. Il faut demander à l'intéressé ou à son représentant ce qu'il pense du processus d'examen et faire état de cette opinion dans le rapport. Le texte de cette opinion doit, le cas échéant, être également communiqué à l'autorité chargée d'enquêter sur les allégations de torture ou de mauvais traitements. Il incombe à l'État de veiller à ce que ce document parvienne effectivement à cette autorité. Le rapport ne doit être communiqué à personne d'autre, sauf avec le consentement de l'intéressé ou l'autorisation d'un tribunal habilité à cet effet.

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1 / Dans certains cas, la déontologie exigera que ces renseignements restent confidentiels. Cette exigence devra être respectée .